Aspect transculturel des diagnostics

La formulation d’un diagnostic est une tâche complexe. Elle nécessite une étude méticuleuse et une observation rigoureuse du sujet, tout en tenant compte de sa culture et du contexte transculturel. Ces facteurs nous aident à développer une compréhension précise des raisons sous-jacentes à ses actions. Si la psychanalyse suggère que certaines structures psychiques sont universelles, elle admet également que les symptômes peuvent différer grandement d’une culture à une autre.

Le chaman

Prenons l’exemple d’un chaman. Dans les sociétés occidentales, il pourrait être perçu comme fou, psychotique et malade. Pourtant, dans certaines cultures traditionnelles, bien qu’il soit considéré comme différent, son rôle est reconnu comme bénéfique et essentiel pour la communauté.

Dans le cadre de cet article, nous allons nous concentrer sur le cas du criminel, en insistant sur l’importance de son contexte culturel. Pour cela, nous devons d’abord comprendre la nature de la culture elle-même.

En effet, la culture, en tant qu’invention humaine, est absente à l’état de nature. Elle naît d’une rupture avec la nature et sert à créer un cadre de vie sociale harmonieux, minimisant l’influence de la loi du plus fort. Cela soulève la question : “Le crime est-il une régression vers l’état de nature et une résistance à la culture ?”

Chaque culture possède sa propre vision du monde, et donc sa propre interprétation des signes et des symptômes. En ce sens, le symptôme est un phénomène social. Le crime peut alors être perçu comme un symptôme social, une période d’anomie (où la loi est suspendue), selon P-L. Assoun.

" Psyché et société sont à la fois indissociables et
irréductibles l’une à l’autre. " Castoriadis

Selon la psychanalyse, les tabous du meurtre et de l’inceste sont universels. Néanmoins, les manifestations de ces interdits peuvent varier d’une culture à une autre. Et malgré ces tabous, l’homme continue de les transgresser.

Le crime, en tant que violation grave de la loi, peut se présenter sous différentes formes et degrés de gravité. Lorsque nous parlons de crime, le meurtre vient souvent à l’esprit, en tant que manifestation la plus extrême du crime.

L’Amok

L’Amok, par exemple, est une crise de violence meurtrière en Malaisie, qui se termine par la mort de l’individu. Cet exemple nous incite à réfléchir sur l’influence inconsciente de la culture sur le comportement de ces individus. Pourquoi la violence éclate-t-elle chez certains individus et pas chez d’autres ? Pourquoi pousse-t-elle certains à tuer et pas d’autres ? Voilà autant de questions que la criminologie se doit de poser.

Comme l’affirme P-L. Assoun, “le criminel fait surgir la violence dans le réel”. Nous pouvons également penser à des formes modernes d’Amok dans d’autres cultures, comme le kamikaze qui cherche à tuer un maximum de personnes. Ces individus ne sont pas nécessairement psychotiques, mais il serait intéressant d’étudier les
émotions qui ont déclenché ces actes dévastateurs.

Au-delà du meurtre, il existe d’autres types de crimes, comme le viol et l’inceste. Le viol est sans doute le crime le plus dévastateur du point de vue symbolique, puisqu’il constitue une violation à la fois pénale et symbolique. Il est également intéressant d’interroger les réactions de certaines victimes de crimes, qui
peuvent s’identifier à leur agresseur et reproduire des comportements criminels. Par exemple, les enfants violés par des soldats en Afrique peuvent devenir à leur tour des enfants soldats auteurs de viols.

De même que Winnicott, Castoriadis envisage le sujet en fonction de son environnement, contrairement à d’autres psychanalystes. Il est essentiel de considérer le sujet dans son contexte social, car il en fait partie intégrante et est fortement influencé par lui.
C’est pourquoi, en psychanalyse, l’inconscient est central, comme le disait Lacan : “l’inconscient c’est le politique”, autrement dit, le discours de l’Autre, le vivre ensemble et le rapport à l’Autre.

Dans le mot “crime”, on peut entendre le “cri” – peut-être une tentative de se faire entendre et de mieux se faire comprendre.